Chapeau en paille sur-mesure fait main en France par une artisan créatrice
 

Des chapeaux créateur, de la qualité, un savoir faire incroyable, du Made in France. Mais surtout : une reconversion très réussie ! Johanna nous ouvre les portes de sa passion avec beaucoup de générosité.


Quel est ton parcours ?

C’est une reconversion, car à la base je suis formatrice en esthétique et technicienne de laboratoire cosmétique. Ça n’a rien à voir et en même temps si !

Quand j’étais plus petite je rêvais d’être créatrice de robes de mariées. En grandissant je me suis rendu compte que ça n’était pas ma voie. En 2012, sur mon temps libre, j’ai commencé à créer des accessoires de tête en tous genres : des foulards, des turbans, des bérets... C’était complètement de façon amateur. Mon travail plaisait et j’ai commencé à vendre et à jongler avec mes deux activités :  l’enseignement d’esthétique et laboratoire cosmétique la journée et créatrice le soir. C’était aussi bien souvent durant mes heures de sommeil !

Au bout de deux ans je me suis retrouvée avec plein d’idées en tête mais impossibles de les réaliser car je n’avais pas de technique. Il y avait un vrai savoir-faire qui me manquait.

En 2014, avec les retombées de la crise économique, je me suis retrouvée sans travail fixe et j’en ai profité pour me lancer dans une reconversion. J’ai présenté mon projet au Pôle Emploi et j’ai eu de la chance car ma conseillère a adoré l’idée et m’a suivie. J’ai pu retourner à l’école, repasser d’enseignante à élève pendant un an pour obtenir un diplôme de CAP modiste, chapelier.

Comment se sont passées tes études ?

J’ai découvert des choses extraordinaires. L’art, le monde du spectacle... J’ai découvert beaucoup de métiers et je me suis rendu compte que dans le milieu artistique il y a toujours des choses à apprendre. C’est vraiment extraordinaire.

Pendant la formation il y avait des stages obligatoires. J’ai pu avoir des très beaux stages dans des prestigieuses maisons comme à l’Opéra Garnier, Marie Mercier et aussi Maison Michel, qui appartient à Chanel.

Je me suis faite remarquer et quelques mois plus tard je me suis retrouvée sur la confection de chapeaux exclusivement pour Chanel. C’est un parcours un peu inespéré pour une reconversion.

Pourquoi n’es-tu pas restée chez Chanel ?

Travailler chez Chanel c’était mon envie secrète et j’étais heureuse de m’y retrouver ! Mais mon but premier c’était de me mettre à mon compte et de pouvoir créer. Quand j’ai un objectif je ne lâche pas.

Du coup, il y a un peu plus de deux ans, je me suis lancée dans mon propre atelier.

Finalement, je suis dans la continuité de rendre la femme belle. C’est dans cet aspect que ce nouveau monde n’est pas si éloigné de mon premier parcours. Saisir la personnalité de chaque cliente et mettre en avant les qualités de chacune. Chaque femme est jolie.

Parfois les gens disent : « Je n’ai pas une tête à chapeaux ». Je réponds que cela n’existe pas. Il suffit de trouver la forme qui nous convient pour nous mettre en valeur.

Je ne fais que des belles rencontres.


Pourquoi avoir choisi les chapeaux et les accessoires de tête ?

J’ai eu la chance de connaître mes deux grands-mères. Avec l’une, j’ai appris le style et les belles matières (elle fabriquait elle aussi quelques chapeaux). Avec l’autre, j’ai appris quand j’étais jeune, à coudre et à jouer à partir de rien. Quand on créé des accessoires de tête on part de rien et en quelques jours ça prend forme. On peut aussi utiliser n’importe quel accessoire et jouer avec. L’idée est de faire preuve d’ingéniosité et créativité pour arriver au résultat souhaité.

Par ailleurs le nom de la marque, Odèle, est une contraction des deux prénoms de mes grands-mères, une manière de faire perdurer ces souvenirs  et ces transmissions familiales.

Aussi, quelqu’un de très proche a été atteint d’un cancer et a perdu ses cheveux. Elle perdait sa féminité et j’ai vu que c’était difficile pour elle. Inconsciemment ça m’a donné envie d’aider ces femmes. Et les femmes à se sentir belles.


Suis-tu des traditions ? Un savoir- faire particulier ?

Un savoir-faire français, ce qui n’est pas le même qu’aux États-Unis ou en Angleterre. Par exemple, en France, la manière de mouler le feutre est différente. La finition ne va pas être la même. Aux USA ils brûlent le poil du feutre pour que ce soit très ras. Nous on va le bichonner, c’est-à-dire le brosser dans un même sens pour lui donner un bel aspect velours.

Combien d’étapes sont nécessaires pour faire un chapeau ?

La première étape c’est de préparer son feutre. Il est sous une forme plutôt conique, il faut donc qu’on l’apprête. On lui met un produit à l’intérieur pour qu’il puisse garder la forme.

On le laisse reposer pendant un moment. Ensuite on va chauffer la matière à l’aide de vapeur. En parallèle on prépare notre moule en bois. Une forme pour une taille.

Une fois que la matière est chaude, on tire la matière très forte pour qu’il prenne forme sur le bois. Au début on a beaucoup de cloques aux doigts car c’est vraiment très chaud ! Et on fige notre feutre avec des argentines (sortes de clous) et notre marteau.

On bichonne le feutre, c’est-à-dire qu’on le brosse pour lui donner un bel aspect de beau feutre. Une fois que la matière est bloquée, on la laisse sécher. Il faut laisser sécher environ une journée, en fonction du temps et de l’humidité.

Ensuite on travaille sur les finitions. On met le gros grain intérieur pour fixer la taille définitive. On fait ensuite la décoration.

Il faut un bois différent pour chaque taille. Tout est fait par un artisan français. Il n’en reste que quelques-uns en France. On appelle ça des formiers. Ils vont tailler, sculpter le bois dans leur matière. On utilise du bois de tilleul car il est suffisamment résistant à la chaleur et l’humidité. Et en même temps suffisamment tendre pour planter les clous facilement dedans.

On doit prendre soin de notre bois. On le revernit nous-même, on rebouche les trous, etc.

Donc là finie la formation d’esthéticienne : finis les beaux ongles !

Combien d’heures passes-tu sur une création ?

Je suis obligée d’en faire plusieurs en même temps, car ça me prend 3-4 jours. Pour un turban sur mesure, on va vraiment mouler la tête, etc. Une création me prend vraiment trois jours.

Tout est cousu à la main, c’est un travail très long.


Chez Chanel tu faisais tout ce travail ?

Non. Il y a 50 ans, il y avait les chapeliers qui étaient uniquement des hommes, car c’est un travail très physique. Ils s’occupaient de mettre en forme les chapeaux. Ensuite il y avait la modiste qui décorait le chapeau. De nos jours, ces deux métiers ont été réunis en un. Chez Chanel c’est toujours séparé, il y a l’atelier de chapeliers, qui n’est pas exclusivement masculin, et l’atelier de modistes qui n’est pas non plus exclusivement féminin.

Fais-tu du sur-mesure ?

Du sur-mesure et de la demi-mesure depuis de ma collection basique.

C’est quoi le chapeau le plus fou qu’on t’ai demandé de réaliser ?

Un chapeau hexagonal, destiné à la scène pour un musicien. J’ai également pu réaliser un turban avec une envolée de papillons.

La majorité des chapeaux faits sur-mesure sont pour les cérémonies.

As-tu des conseils d’entretien à nous donner ?

Un chapeau ce n’est pas un parapluie ! Il ne faut pas sortir avec quand il pleut.

Il faut le protéger de la poussière en le gardant précieusement dans sa housse ou boîte.

Il faut faire attention aux rayons de soleil et de la lune, qui peuvent altérer la couleur de votre chapeau.

Éviter d’empiler les chapeaux qui n’ont pas la même forme les uns sur les autres, ils risquent de tous se déformer.

Il faut aussi le brosser régulièrement avec une brosse à chapeaux.

Pour une paille, on va l’humidifier de temps en temps, sinon elle va devenir cassante.

Le ruban à l’intérieur du chapeau peut être tâché par le fond de teint ou la transpiration. Il faut aller le changer chez le chapelier. C’est aussi pour cela qu’elle s’appelle une bande de propreté. Nous on le change. Cette bande est là pour que le chapeau reste à la bonne taille et elle est aussi faite pour récupérer les traces de maquillage ou de transpiration. C’est pour ça que je n’utilise que des bandes en coton.

Quelles sont les matières avec lesquelles tu préfères travailler ? 

En hiver, on est principalement sur le feutre. Le feutre de laine en basique mais je travaille surtout le feutre de lapin, qui est vraiment très beau.

Il y a aussi du tweed, de la fourrure, du cuir. Je travaille beaucoup le cuir en décoration. Il y a toujours une histoire derrière avec des artisans français. J’aime pouvoir partager mes idées avec les autres artisans pour que l’on puisse aller plus loin chacun.

Et en été on va être sur de la paille, de la paille cousue, des tissus.

Je fais également la mariée et ses accessoires.

 Est-ce que tu continues les bijoux de tête ?

Oui. Je travaille beaucoup le cuir, des fleurs en cuir, des Swarovski, toujours tout fait à la main. L’idée c’est d’apporter une touche romantique et un peu rock avec le cuir.

Une époque particulière ?

Les années 30-50. J’aime beaucoup le rétro en y ajoutant une touche moderne. L’idée c’est un accessoire qui soit décontracté et de ne pas attendre une occasion pour pouvoir le mettre.

Quelles sont tes sources d’inspiration ?

Je m’inspire beaucoup de mes voyages, même si je ne voyage pas beaucoup ! Les couleurs, la rue, ce qu’on va manger, la mode locale, l’histoire du pays. Je m’inspire beaucoup de l’Espagne.

Un petit secret à partager avec nous ?

Je jongle avec ma vie de maman. Ma fille m’aide à l’atelier car je travaille beaucoup. Elle a beaucoup de goûts et m’aide à choisir. Elle sait conseiller les clientes, elle a l’œil. Je l’emmène souvent avec moi à l’atelier. Ma fille me chuchote dans mon oreille des petites idées pour la cliente et c’est souvent des très bonnes idées.

 

Merci beaucoup Johanna !

J’adore, j’adore, j’adore. Parler avec elle était passionnant. Elle vous entraîne dans sa fougue et sa grande détermination. C’était très difficile de faire un choix dans les visuels, car tout est tellement beau. Par contre j’espère être la seule, mais quand j’ai entendu ses conseils j’ai réalisé que je faisais tout l’inverse !

Parce que ses créations sont magnifiques, je vous rajoute quelques visuels pour le plaisir des yeux :)

Son e-shop est ouvert et vous verrez des prix abordables quand on comprend le travail qui est derrière !

À très bientôt !

Giulia

 Vous pouvez également rendre visite à Johana dans son atelier boutique à Paris (Gare de Lyon). Vous pouvez la voir confectionner et vous pourrez également échanger avec elle dans l’atelier qui est tout ouvert au public. 

28 Rue Traversière, 75012 Paris - 09 73 13 83 36

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